uivait une autre kyrielle de gémissements douloureux et émouvants, pour dire, au moment où elle s'éloignait déjà vers la colline qui couvrait les flancs des montagnes : "...Où
irez-vous... où pourrais-je vous emmener pour que vous échappiez
à un destin si funeste... mes enfants, vous êtes sur le point
de vous perdre..." En entendant ces mots, qui furent
vérifiés plus tard par les augures, les quatre prêtres
tombèrent d'accord sur le fait que cette apparition fantomatique
qui emplissait de terreur les gens de la grande Tenochtitlan, était
la Déesse Cihuacoatl elle-même, la divinité
protectrice de la race ; cette bonne mère qui avait hérité
des dieux pour finalement déposer son pouvoir et sa sagesse chez
Tilpotoncatzin, détenteur en ce temps là de la dignité
sacerdotale.
- Seigneur,
- lui dirent-ils -, ces vieilles anales nous racontent
que la Déesse Cihuacoatl apparaîtra, selon la sixième
prévision des devins, pour nous annoncer la destruction de votre
Empire. Des sages, plus sages et plus anciens que nous, disent ici que
des hommes étrangers viendront de l'Orient et domineront ton peuple
et toi-même. Toi et les tiens souffrirez de beaucoup de larmes et
de grandes peines, ta race sera dévorée et nos Dieux seront
humiliés par d'autres Dieux plus puissants.
- Des Dieux
plus puissants que notre Dieu Huitzilopochtli, et que le Grand Destructeur
Tezcatlipoca, et que nos formidables Dieux de la guerre et du sang ?
- demanda Moctezuma en baissant la tête avec peur et humilité.
- C'est ce que disent des sages et des prêtres plus sages et plus vieux que nous, seigneur. C'est pour cela que la Déesse Cihuacoatl erre sur le anahuac en lançant des pleurs et en traînant sa peine, criant les malheurs qui vont arriver très bientôt à votre Empire, pour qu'entendent ceux qui sauront écouter.
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